En Inde, l’oligarchie au mépris du pluralisme dans les médias

En Inde, l’oligarchie au mépris du pluralisme dans les médias

À l’occasion des élections législatives qui ont débuté vendredi, tour d’horizon des menaces qui pèsent sur le pluralisme et la liberté des médias en Inde.

Il y a un mois, une figure majeure de l’opposition indienne, le ministre en chef de la région de Delhi, Arvind Kejriwal, a été arrêté et emprisonné pour corruption. Un prétexte, selon ses partisans, pour l’écarter de ces élections. Or, il y a une chaîne de télévision qui aurait sans conteste pu faire entendre sa voix contre ce type de procédé il y a encore 18 mois, c’est la New Delhi Television, la NDTV, qui était la dernière grande chaîne indépendante du pays. Seulement, à la fin 2022, la NDTV a été rachetée par Gautam Adani, un multimilliardaire proche du Premier ministre Narendra Damodardas Modi et elle a vu partir tous ses journalistes vedettes.

« 99,9% des médias indiens vont maintenant faire l’éloge du gouvernement Modi », a prévenu Ravish Kumar, un ancien rédacteur en chef de NDTV. Gautam Adani, première fortune d’Asie, a construit son empire dans les pas de Narendra Modi lorsqu’il était à la tête de l’État du Gujarat. Et l’autre grand propriétaire de médias, Mukesh Ambani, à la tête du groupe Reliance, est aussi un ami personnel du Premier ministre. Son groupe touche 800 millions d’Indiens avec 70 médias.

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Une très mauvaise place dans le classement de Reporters sans frontières

L’Inde hérite désormais de la 161ᵉ place sur 180 au classement mondial sur la liberté de la presse de Reporters sans frontière, peu après la Russie – ce qui est rarissime dans une démocratie. L’Inde a d’ailleurs perdu 21 places en dix ans depuis l’arrivée au pouvoir de Modi. L’oligarchie a eu raison du pluralisme. Et ce n’est pas le seul problème : 29 journalistes ont aussi été tués depuis 2014, neuf sont emprisonnés et on ne compte plus les mesures de répression, de censure ou d’espionnage. Même les médias étrangers ne sont pas à l’abri, comme on l’a vu avec l’expulsion de Vanessa Dougnac, une correspondante française depuis plus de vingt ans.

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Une censure qui s’exprime aussi sur Internet

L’Inde est aussi devenue la championne du monde des coupures d’accès à internet, selon RSF. Ce qui favorise les infox et la désinformation en période électorale. Mais le pouvoir sait aussi user des réseaux alors que 700 millions d’Indiens ont moins de 30 ans et que la moitié de la population a accès au web. Il profite de la très grande notoriété de Modi, qui a plus de followers sur X que Donald Trump, pour attirer des influenceurs dans les filets de son parti, le BJP. Certains sont payés, d’autres sont des stars des réseaux qui tirent profit d’un post de Modi diffusant leur musique, par exemple depuis un temple hindou. Ils influencent à leur tour des micro-influenceurs qui finissent par relayer la bonne parole du gouvernement. Si bien que la crainte existe d’une élection… sous influence.

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