Aboubakar Ousmane Mey manœuvre pour conquérir l’électorat du Grand-Nord

Aboubakar Ousmane Mey manœuvre pour conquérir l’électorat du Grand-Nord

Depuis qu’il a déclaré sa candidature le 31 juillet dernier à la prochaine élection présidentielle, Aboubakar Ousmane Mey (photo) prépare discrètement la feuille de route de la Coordination pour le changement du Cameroun (CCC), la plateforme politique naissante qui est censée l’investir le moment venu. Il a choisi de présenter cette feuille de route, dans les prochains mois, à Dakar, sur la tombe de l’ancien président Ahmadou Ahidjo. Un choix chargé de symbolisme pour cet opposant de 61 ans qui nourrit l’ambition de devenir la principale figure politique du Grand-Nord, comme l’a longtemps été Ahidjo avant sa mort en exil.
Aboubakar Ousmane Mey est convaincu que son heure est venue de briller dans le ciel politique des trois régions du septentrion (Adamaoua, Nord et Extrême-Nord). Il admet que l’élite politique du Grand-Nord est à bout de souffle. « Le bateau prend l’eau de toutes parts. Notre démarche est donc salvatrice », déclare celui qui a pris les rênes de la CCC. Il ajoute que les populations attendaient désespérément une nouvelle offre, car elles ne s’identifient plus aux leaders politiques du Grand-Nord, qui soutiennent pour la plupart le Rassemblement démocratique du peuple camerounais (RDPC), le parti au pouvoir.
Tabaski
Pour redonner confiance aux populations des trois régions du Grand-Nord, la CCC promet de s’attaquer aux problèmes préoccupants du moment : l’insécurité ourdie par la secte islamique Boko Haram, les déplacements de populations, l’accès aux infrastructures sociales… Aboubakar Ousmane Mey rappelle que l’idée de créer la CCC est née dans le salon de son domicile à Garoua, le 18 juillet, alors qu’il célébrait la fête de la Tabaski avec ses amis et proches. « C’est un jour symbolique. C’est le 18 juillet 1983 qu’il y a eu cette réunion du Lac pendant laquelle il a été décidé que les ministres originaires du Grand-Nord devaient quitter le gouvernement pour protester contre les mauvaises décisions de Paul Biya », explique Aboubakar Ousmane Mey, précisant que ces mêmes mauvaises décisions de l’actuel locataire du palais d’Etoudi sont responsables des maux qui préoccupent la CCC.
L’agenda d’Aboubakar Ousmane Mey prévoit aussi qu’il rencontre la diaspora du Grand-Nord. Une première rencontre est prévue dans les prochaines semaines aux États-Unis ou au Canada. Une seconde rencontre se tiendra dans une capitale africaine pour « huiler la machine », commente l’intéressé.
La stratégie adoptée par la plateforme qu’il a créée est d’étendre son influence à tout le pays, en se servant du Grand-Nord comme embryon. La première étape de cette démarche est la consolidation de la base électorale dans le Grand-Nord. Ensuite, viendra l’ouverture par des collaborations plutôt que par des alliances, que la CCC juge infructueuses. Quoi qu’il en soit, ce choix peut être taxé de clivant dans l’opinion. En réponse, Aboubakar Ousmane Mey relativise : « On accuse déjà tous les opposants de repli identitaire. Au Cameroun, tout le monde passe par ce labo ».
Bémol
Selon cet opposant, la balle est dans ses mains et il lui revient maintenant de concrétiser ses ambitions. Cependant, cela ne sera pas simple. D’abord à cause de ses origines. Son père, Abba Ousmane Mey, a été un des hommes-clés du régime du président Ahidjo. Après le départ de ce dernier du pouvoir, la famille Ousmane Mey est restée très influente dans le sérail politique. Alamine Ousmane Mey, le frère du président de la CCC, est d’ailleurs ministre de l’Économie, après avoir été l’argentier du gouvernement. Il sera difficile pour Aboubakar Ousmane Mey de se faire entendre alors qu’il rame à contre-courant.
« C’est une candidature comme les autres, la vraie question est de savoir si cette candidature sera validée », s’interroge un journaliste spécialisé du Grand-Nord. Cette interrogation laisse penser que le plus dur pour Aboubakar Ousmane Mey sera de se retrouver dans les starting-blocks de la prochaine présidentielle, attendue à la fin de l’année prochaine. Rien n’est encore gagné. Surtout que la CCC ne peut pas, en l’état actuel, investir un candidat, car cette plateforme n’a pas d’élus. Une fois encore, Aboubakar Ousmane Mey relativise : « On trouvera forcément un parti pour porter nos idées ».
Michel Ange Nga
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