Inde: entre croissance fulgurante et disparités sociales

De notre correspondant en Inde

Awdesh Chaturvedi est un quadragénaire ravi. Il a récemment trouvé la voiture qui convient à sa famille de sept personnes, et à son budget : un SUV français marron, de la marque Renault. Son prix, environ 10 000 euros. « La voiture est spacieuse et cela permet à toute la famille de partir en vacances dans la même voiture. Elle a de bonnes options, le tout dans mon budget, en plus ma femme l’a trouvé belle ! », se réjouit-il.

Renault a bien percé sur le marché indien, et se place dixième en termes de ventes. L’entreprise surfe sur l’enrichissement des Indiens de cette classe moyenne supérieure. Après le Covid, ces Indiens aisés ont vu leurs revenus augmenter. Ils dépensent beaucoup plus, et investissent. La bourse de Bombay vient ainsi de devenir la quatrième plus riche du monde, dépassant celle de Hong Kong.

Mais les classes populaires, qui représentent la majorité de la population, ne se sont pas remises de la crise du Covid. Et s’appauvrissent. C’est le cas de Salma, une employée de maison de la banlieue de Delhi, qui vit seule avec ses quatre enfants dans un petit deux pièces. Elle gagne à peine 100 euros par mois. « Avant le Covid, j’avais des employeurs réguliers, mais j’ai tout perdu, confie-t-elle. Encore aujourd’hui, je n’arrive pas à retrouver le même niveau de revenu. Je gagne moins de la moitié qu’avant… Mes parents m’aident, donc j’arrive juste à acheter de la nourriture, mais je réduis nos dépenses médicales. »

Le gouvernement affirme avoir divisé par trois la pauvreté depuis dix ans, mais les statistiques sont de moins en moins fiables en Inde. Et de plus en plus politisées. Ce qui rend sceptique Deepanshu Mohan, économiste et directeur du centre des nouvelles études économiques à l’université Jindal. « Les salaires réels, après inflation, ont fortement baissé. Et le gouvernement fournit une aide alimentaire à 800 millions de personnes, et annonce étendre cette aide pour cinq ans encore. Si autant de personnes ont besoin d’aide pour se nourrir, cela donne une idée du niveau de pauvreté », indique-t-il.

Le gouvernement a essayé de développer l’industrie, pour augmenter le nombre d’emplois peu qualifiés. Mais cela n’a pas fonctionné, et aujourd’hui, la croissance est donc tirée par une petite minorité qui travaille dans les services qualifiés.