Pourquoi la Chine et l’Inde scrutent avec attention les élections au… Bhoutan – L’Express

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Pourquoi la Chine et l’Inde scrutent avec attention les élections au… Bhoutan – L’Express

Après un premier tour fin novembre, les Bhoutanais sont une seconde fois appelés à se rendre aux urnes pour élire les 47 députés qui siégeront à l’Assemblée nationale. Une élection surveillée comme le lait sur le feu par deux géants aux ambitions démesurées qui partagent une frontière commune de 3 500 kilomètres : la Chine et l’Inde.

Depuis plusieurs années, ces deux rivaux lorgnent les frontières stratégiques de ce royaume peuplé de 800 000 âmes. Et pour cause, le Bhoutan, pris en étau entre l’Inde et la Chine, constitue « l’un des derniers obstacles » à la tentative chinoise d’exercer une influence en Asie du Sud, décrypte auprès de l’AFP Harsh V. Pant, professeur de relations internationales au King’s College de Londres.

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La Chine gagne du terrain

Si la Chine et le Bhoutan n’entretiennent à ce jour aucune relation diplomatique formelle, Pékin tente de se frayer un chemin dans ce pays d’Asie du Sud grand comme la Suisse et hautement stratégique. En octobre dernier, un « accord de coopération » a été signé entre le Bhoutan et la Chine après des négociations sur leur frontière nord. Le ministère chinois des Affaires étrangères a notamment souligné auprès de l’AFP « la détermination [de Pékin] à œuvrer pour une résolution rapide de la question frontalière et l’établissement de relations diplomatiques [avec le Bhoutan] ».

Un rapprochement vu d’un mauvais œil par New Delhi, qui considère l’Etat tampon comme sa chasse gardée. L’inquiétude grimpe en décembre, après la publication d’un rapport du centre de réflexion britannique Chatham House. Des photos satellite révèlent l’existence de ce que l’institut présente comme un « programme non autorisé de construction d’implantations » chinoises dans la région frontalière du nord du Bhoutan. Et qui pourrait « devenir un territoire chinois permanent », en cas d’accord frontalier.

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Pékin espère notamment qu’un texte « consolidant ses acquis dans le nord du Bhoutan puisse conduire à des relations diplomatiques formelles et à l’opportunité d’attirer Thimphou dans son orbite », précise Chatham House. « [Mais] un tel accord aurait des implications d’une portée considérable pour l’Inde« , relève Harsh V. Pant. Et davantage encore qu’un partenariat Chine-Bhoutan semble « imminent », alerte Suhasini Haidar, rédactrice en chef du service diplomatique du quotidien The Hindu.

Une influence chinoise à relativiser

Si de nombreux observateurs agitent le spectre d’une avancée considérable de la Chine dans l’enclave, l’Inde reste le premier partenaire commercial de Thimphou ainsi que sa principale source d’investissements. En décembre, le roi du Bhoutan, Jigme Khesar Namgyel Wangchuck, a annoncé la création d’une zone économique spéciale le long de sa frontière avec l’Inde. En outre, la monnaie locale est davantage rattachée à la roupie indienne.

Raison pour laquelle le royaume sait ô combien sa relation avec New Delhi est cruciale. D’autant que l’Inde a annoncé une série de projets de transports, notamment une ligne ferroviaire vers le Bhoutan, qui dépend en grande partie des investisseurs indiens.

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Les deux candidats en lice au poste de Premier ministre du Bhoutan plaident d’ailleurs pour un rapprochement avec le voisin indien, afin de relancer l’économie du pays, dont le produit intérieur brut atteint à peine 3 milliards de dollars. « Tout gouvernement arrivant au pouvoir cherchera à resserrer les liens », estime Suhasini Haidar.

L’Inde sur ses gardes

Malgré cette proximité relationnelle, New Delhi reste sur ses gardes. Une méfiance qui s’inscrit dans un contexte plus large de volonté hégémonique de Pékin, qui multiplie les accords commerciaux et les prêts avec les pays qu’elle considère comme sa zone d’influence. Parmi lesquels le Bangladesh, le Népal, les Maldives et le Sri Lanka.

A noter que ce regain de tension dont le Bhoutan est l’épicentre fait écho à un épisode survenu en 2017. Soldats indiens et chinois se sont affrontés soixante-douze jours durant sur le plateau contesté du Doklam, à la jonction des territoires indien, chinois et bhoutanais. En 1962 déjà, les deux Etats se sont livrés une guerre éclair à l’issue de laquelle les soldats indiens ont été humiliés par les troupes chinoises. Comme un air de déjà-vu.

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