cuisante défaite pour CNews, la guerre civile n’a pas eu lieu

cuisante défaite pour CNews, la guerre civile n’a pas eu lieu

MA VIE AU POSTE, LA CHRONIQUE DE SAMUEL GONTIER – Un meutrier déferlement de supporteurs du Maroc ivres de sang, d’honnêtes Français et d’intrépides commerçants menacés de lynchage par des hordes vengeresses sourdes aux bienfaits de la colonisation… Depuis samedi dernier, les journalistes et les experts de CNews (appuyés par Éric Zemmour et Yves Calvi sur BFMTV) prédisaient que l’apocalypse surviendrait sitôt finie la demi-finale de la Coupe du monde. Las, encore raté.

« Tout le monde a peur d’une guerre, d’une guérilla et d’une guerre civile. » Ce témoignage n’est pas celui d’une Péruvienne angoissée par les récents troubles politiques dans son pays. C’est l’épouvante exprimée sur CNews par la maire du 8e arrondissement de Paris, Jeanne d’Hauteserre, au matin du match France/Maroc. Depuis plusieurs jours, les experts de la chaîne alertent. Jean-Claude Dassier : « Quel que soit le résultat de mercredi soir, nous risquons d’avoir des incidents. » Hervé Moreau : « Quoi qu’on en dise, je peux vous assurer qu’il y aura des heurts mercredi soir et des émeutes. » Foi de capitaine de gendarmerie sanctionné par sa hiérarchie. « C’est une soirée à risques !, alerte un invité de Morandini. — Voilà ! Mais c’est ça qu’on voulait entendre ! », s’écrie l’animateur, spécialiste des soirées à risques majeurs pour les mineurs. « Je suis très inquiet à l’idée du match France/Maroc », confie Alain Finkielkraut, philosophe du sport masculiniste.

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Chez Laurence Ferrari, Nathan Devers, philosophe du renoncement, recommande aux Nantais de se réfugier en Vendée pour échapper à l’inéluctable saccage de leur cité : « Une politique municipale a contribué à l’augmentation de l’insécurité, à dégrader les conditions de vie dans cette ville où il faisait encore bon vivre il y a quelques années. » Avant la submersion socialo-immigrationniste. Un titre de CNews annonce : « Les commerçants des Champs-Élysées très inquiets avant France/Maroc. » Ils devraient s’estimer heureux de ne pas exercer leur activité à Nantes. Pascal Praud s’alarme : « Pourquoi les Champs-Élysées restent ouverts ? » Pourtant, rappelle fort à propos la maire du 8e, « en 98, il y a une voiture qui a foncé dans la foule ». Comme à Nice en 2016. Pas de doute, il se prépare un attentat de supporteurs djihadistes. Un présentateur relaie : « Y a eu une note des services de renseignement qui avertit qu’il y aura des excités en particuliers dans le camp des Marocains. » Des « excités » ? Sans doute un nom de code de la DGSI pour « terroristes ».

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Afin de me prémunir de l’inéluctable guerre civile, j’ai entassé des sacs de sable devant mes fenêtres, enfilé mon gilet pare-cimeterre, graissé le LBD et le lanceur de grenades de désencerclement empruntés à un ami policier. Le premier basané qui s’approche de chez moi, je vais lui faire passer le goût de supporter l’équipe du Maroc. En attendant, je me documente sur l’origine du péril imminent. Selon Sandrine Pégand, avocate des croits de l’homme caucasien, « il y a vrai phénomène identitaire. J’ai le sentiment qu’il y a un malaise de la part de ces marocains qui sont dans la revanche. On se rend bien compte que le sport est révélateur des ambiguïtés ». Des ambiguïtés arabo-islamistes.

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Sur des images de Champs-Élysées en feu, Alexandre Devecchio (Le Figaro) confirme : « Il y a une forme de crispation identitaire. » Des supporteurs du Maroc, bien sûr, pas des éditorialistes de CNews. Geoffroy Lejeune (Valeurs actuelles) précise : « Après plusieurs générations sur notre sol, ces gens soutiennent encore le Maroc comme leur pays de cœur. » Pas étonnant de la part de Français de papiers. La journaliste Karima Brikh a mené une enquête de terrain : « Certaines personnes de la deuxième ou troisième génération issues de l’immigration ont une sorte de haine, de crise d’identité. » Ça n’arriverait pas aux experts de la chaîne info. « L’attachement à la France n’existe pas », se désole Charlotte d’Ornellas (Valeurs actuelles), elle-même très attachée à la France (de Pétain).

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Élisabeth Lévy décrypte : « Ça dit autre chose que du football, ça dit qu’il y a plusieurs peuples dans notre pays, du ressentiment colonial entretenu. » Par les anciens colonisés revanchards, pas par les colonisateurs nostalgiques. Ce désir de revanche, Gabriel Cluzel (Boulevard Voltaire) aussi l’a décelé chez les islamo-berbères : « L’objet n’est pas un ballon de foot, c’est un emblème, un symbole, une revanche qui dépasse largement les frontières de la France et du Maroc. » C’est pire que ce que je craignais. Faut-il s’attendre à une guerre civile européenne ? « On a ces débordements dans plusieurs pays d’Europe, confirme l’avocate Laure-Alice Bouvier (garants de l’État de droit, les membres du barreau sont omniprésents sur CNews). On peut se demander si l’on n’a pas un inconscient collectif qui conduit ces pays longtemps sous la coupe de pays européens à prendre leur revanche. » En projetant de nous grand-remplacer. Je demande l’intervention de l’Otan. Sans nos alliés américains, notre continent sera submergé par ces hordes d’islamo-supporteurs assoiffés de vengeance.

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Pour prendre du recul, je consulte l’analyse du magazine Causeur, qui célèbre déjà une victoire, précisément la « victoire de la mission civilisatrice de la France qui a su former un être humain aussi admirable que l’entraîneur de l’équipe marocaine ». Walid Regragui est en effet un binational grandi en France, atout grâce auquel il a évité aux Lions de l’Atlas de perpétuer un schéma de jeu des années 30 — depuis longtemps renié par les experts de CNews, vous l’aurez noté.

BFMTV a tenu à se joindre au concert de sagacité en invitant Éric Zemmour. Le célèbre commentateur sportif interroge : « Comment réagiraient les Marocains si des milliers de Français célébraient leur victoire à Marrakech ? » En se livrant à une razzia dans la médina. Selon le raciste — pardon, le « responsable politique », dixit Benjamin Duhamel —, la sédition pourrait naître au sein même de l’équipe de France : l’existence d’une cinquième colonne y a été mise en évidence par une irréfutable étude de la carnation des joueurs. Et Zemmour de suggérer : « S’il y avait neuf blancs dans l’équipe Sénégalaise, je pense que les Sénégalais s’interrogeraient. » Ils exigeraient la remigration des Français qui menacent de les grand-remplacer depuis que l’Afrique a accordé l’indépendance à la patrie de Maurras, mettant fin à des siècles de colonisation sub-saharienne.

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Yves Calvi, lui, s’attache à introduire de la subtilité sur l’antenne de BMTV : « Pour les grincheux qui s’inquiètent, rappelons que le Maroc n’est pas l’Algérie, nous n’avons pas été divisés par une guerre coloniale. » Si l’Algérie s’était qualifiée pour le Mondial, la France serait déjà dévastée. « Et les Marocains sont exactement comme nous en 1998, poursuit l’anthropologue de studio, ils attendent depuis si longtemps une grande victoire de leur équipe. » Tout en célébrant les bienfaits de notre généreux protectorat qui, à la différence de la colonisation de l’Algérie (source de quelques différends avec nos perfides affidés), ne fut que douceur de l’administration, luxe des infrastructures et volupté des valeurs universelles. Pour résumer, « la dimension affective est devenue démesurée et c’est finalement normal ». Quoi de plus normal qu’un racisme démesuré, s’il est affectif ?

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Sur Cnews, Shannon Seban, élue Renaissance, déplore : « Il y a une façon systématique de vouloir racialiser les matches. » Pas possible ? Encore un coup des indigéno-racialistes dénoncés par les éditorialistes universalistes. À propos de Renaissance, je sais pouvoir compter sur les ténors de la macronie pour apaiser les esprits. « Entre la France et le Maroc, informe CNews, la secrétaire d’État Sarah El Hairy, binationale, a choisi les Bleus. » Ouf, elle n’a pas trahi. Pas plus que le Franco-Provençal Christian Estrosi : « Être Français, c’est soutenir la France. » L’élu niçois prône donc l’adoption d’une loi pour déchoir de leur nationalité les supporteurs français du Maroc. Un homme politique encore plus à gauche, le socialiste Julien Dray, suggère une autre mesure : « Le mortier doit être interdit, ça devient une arme systématique. » Rappelons que les supporteurs du Maroc ne se déplacent jamais sans lance-roquette, obusiers et autres pièces d’artillerie en vogue dans les territoires perdus de la République.

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Sur BFMTV, Éric Zemmour m’a inquiété. Ce match, « c’est une grande frayeur pour la police ». Sur CNews, David Le Bars tempère : « Je ne redoute pas cette soirée dans le sens où je ne la crains pas. » Et vice-versa. « On sait parfaitement qu’il faut s’équiper, assure le syndicaliste policier, être prudent et ne pas s’isoler. » Les fourbes tueurs de flics se jetent sur le moindre fonctionnaire esseulé. « Il faut s’attendre à ce que ce soit un petit peu compliqué à certains moments de la soirée. » Quand une voiture-bélier (de l’Aïd) va foncer sur un cordon de CRS, comme prévu par la maire du 8e. « Il va falloir choisir entre la retraite et l’immigration. » Oups, désolé, j’ai mélangé mes notes de sport et d’économie. Ça, c’est l’édito de Dimitri Pavlenko : « Si vous ne voulez pas d’immigration massive, il va falloir travailler plus longtemps pour sauver notre régime. » Ainsi que les Champs-Élysées. Revenons-y avec un syndicaliste policier : « Les rues adjacentes sont un peu sombres. Il y a une 2e lame qui est prévue, un peu comme les rasoirs. » Très insuffisant face à des égorgeurs munis de cimeterres.

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Un nouvel homme de gauche, Michel Onfray, philosophe du maintien de l’ordre autocratique, suggère de prendre exemple sur les services d’un royaume irréprochable, notant qu’au contraire de leurs concitoyens français, « les Marocains du Maroc ne posent aucun problème. Ils savent bien qu’ils n’ont pas intérêt à poser problème, la police marocaine n’est pas l’équivalent de la police française ». Cette dernière est réputée pour sa tendresse envers les individus de type nord-africain.

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Charlotte d’Ornellas rassure : « On n’est pas en train de demander d’interdire quoi que ce soit, on est en train d’interroger l’appartenance de cœur d’une partie de la jeunesse française. » Et de se demander s’il ne faudrait pas la déchoir de sa nationalité pour la faire remigrer. « Vous noterez que les soirs de matchs du PSG, qui est un club français, ce sont les mêmes drapeaux algériens ou marocains qui sortent. » Il faudrait aussi déchoir le PSG de la nationalité française et le faire remigrer dans un championnat africain.

Chez Morandini, Julien Odoul, député RN, souhaite qu’à Doha, « si La Marseillaise est sifflée, M. Macron quitte le stade ». De bien inoffensives représailles. Puisque la France dispose d’une base militaire aux Émirats Arabes Unis, je suggère que, sitôt parti, le président envoie des Rafale bombarder l’enceinte. Chez Laurence Ferrari, Geoffroy Lejeune prouve définitivement qu’il n’est pas raciste : « Le Maroc est un pays magnifique que moi j’adore. » On y trouve encore des cireurs de souliers, c’est très pratique.

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Le match entre la France et le Maroc débute, prémice à la plus sanglante guerre civile que notre pays ait connu. « Place au sport ! », clame le bandeau. Si j’ai bien suivi, il s’agit d’ériger la ratonnade en discipline nationale. À la mi-temps, Julien Pasquet appelle une envoyée spéciale stratégiquement retranchée dans un bar de l’avenue Kléber, près des Champs-Élysées (j’espère qu’il est doté d’un abri antiatomique). « Ici, il y a une majorité de supporteurs marocains. » Ça y est, le grand-remplacement a commencé. La journaliste interroge un rescapé, « Tom, supporteur de la France : au bout de cinq minutes, la France a gagné »… Un match de foot remporté dès la cinquième minute, je comprends la soif de vengeance des supporteurs maroco-fanatisés. La reporter reprend : « Même s’il y a beaucoup de supporteurs marocains ici, c’est une ambiance plutôt bon enfant. » Ils se croient déjà chez eux.

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La deuxième période débute, le présentateur Olivier Benkemoun s’enquiert : « Et pendant ce temps, que fait la police ? Elle attend. C’est après que ça va se passer. » Que les pillards vont déferler. Pour patienter, rappel du danger imminent dans un zapping maison. Un énième homme de gauche, Éric Naulleau, tente de dissuader les supporteurs des Lions de l’Atlas : « Brûler n’est pas un droit, casser n’est pas un droit. » Non, c’est génétique, explique Pascal Praud : « Les seuls problèmes de la Coupe du monde sont après les matchs du Maroc. » Ou quand l’Algérie se qualifie — alors, c’est l’hallali, selon Yves Calvi.

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Retour au direct, le journaliste politique Yoann Usaï rappelle que « les rencontres entre la France, l’Algérie, le Maroc ou la Tunisie sont toujours considérées par le ministère de l’Intérieur comme des matchs à risques voire à hauts risques ». Les experts de la place Beauvau s’accordent avec les analyses de Jean-Marc Morandini et de Jean-Claude Dassier. « Il y aura ce soir des incidents, poursuit Yoann Usaï, reste à en savoir le degré. » Le plus haut degré du dernier degré, à n’en pas douter. « C’est au gouvernement de prévoir le pire. » Le déclenchement de frappes nucléaires sur Nantes et les Champs-Élysées. Olivier Benkemoun fustige l’imprévoyance des autorités : « Le nombre de policiers mobilisés, c’est que le double par rapport à samedi dernier. Ils disent : “Y a eu que trois vitrines cassées, un scooter brûlé.” » Mes pensées vont à la famille des vitrines et du scooter. « Ils disent que ce sera bon enfant, moi je vous dis que ça sera pas le cas. » On va se faire grand-remplacer. Pourvu que Vincent Bolloré ait fait appel aux miliciens de Wagner pour défendre les studios de CNews.

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Yoann Usaï s’insurge : « Le problème de Gérald Darmanin… » Cet incorrigible flandrin. « C’est qu’il y a eu des dizaines de policiers blessés… » Des centaines de commerçants égorgés. « … Et surtout, dans sa réponse, il oublie de parler des villes de province, notamment Nice, où il y a eu des événements plus graves. » Hiroshima, en comparaison, c’est un barbecue qui a mal tourné.

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C’est la fin du match et le début de la conflagration tant attendue. Julien Pasquet voit déjà le pire se produire : « Nous allons à Nantes… Ouh là, fumigènes ! » Ouh là, c’est le début du massacre de nos compatriotes par les vengeurs du Maroc. Pendant que Nantes flambe, une heure passe à Paris pendant laquelle les génocidaires restent embusqués dans l’obscurité des rues perpendiculaires à la plus dangereuse avenue du monde. Julien Pasquet s’impatiente : « Comment ça se passe sur les Champs-Élysées, l’ambiance est-elle toujours contenue ou ça commence à virer… à prendre une autre tournure ? » Alors, elle vient, cette guerre civile ? Toujours pas. « Peut-être que la victoire de la France a dissuadé certains fauteurs de troubles d’aller sur les Champs-Élysées. » Les vaincus ont préféré remigrer de leur plein gré. À 23h40, enfin, Julien Pasquet peut respirer : « Je reçois quelques messages des journalistes de la rédaction. À Montpellier, Nice, Lens Avignon, on me dit que ça chauffe très très fort. » Les hordes de Berbères ont mis à sac les villes de province avant de converger vers les Champs-Élysées.

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Grâce à Elon Musk et à Twitter, je découvre que cette providentielle ébauche de guerre civile survient grâce au remarquable esprit d’intiative de groupuscules universalistes. Cagoulés, tout de noir vêtus, arborant de fédératrices croix celtiques, ces combattants de la liberté de lyncher en paix ont dans plusieurs villes pris en chasse des supporteurs du Maroc, renouant avec une tradition sportive dans laquelle la France a toujours excellé, la ratonnade. Mieux, place de la Comédie, à Montpellier, ces chevaliers du Zemmouriaque ont chargé sans distinction les supporteurs du Maroc et de la France, réussissant à créer des affrontements entre eux (l’enquête établira si la mort d’un adolescent renversé par une voiture est liée à cette confusion ingénieusement suscitée). Pudique, CNews tait ces maigres progrès, elle a dû concentrer à Nantes et sur les Champs-Élysées tous ses envoyés spéciaux. Pascal Praud avait prévenu : « S’il y a des dégradations (sic) de l’ultradroite, ce sera fortement analysé et commenté. » Les bobos bien pensants de Franceinfo doivent déjà être en édition spéciale pour agonir les défenseurs de nos racines chrétiennes tout en absolvant les criminels supporteurs du Maroc panislamiste.

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Seulement un mort (dont la cause n’est pas certaine), une guerre civile larvée sur CNews mais toujours pas déclarée dans la réalité… Le Huff Post titre : « La joie partagée des supporteurs des deux camps à Paris. » Les journalistes de la chaîne écument, Vincent Bolloré psalmodie des Pater Noster en araméen. Tout en rangeant mes sacs de sable, j’écoute le cinéaste Fabien Oteniente célébrer le génie politique de Didier Deschamps : « Je suis admiratif, l’économie va repartir, il pourrait être président de la République. » Pour l’instant, toutes les chaînes diffusent les images d’Emmanuel Macron venu fêter la victoire dans les vestiaires de l’équipe de France, dont les joueurs l’ont averti : « Il ne faut pas politiser les douches. » Auparavant, devant les caméras, le président s’était félicité que « le Qatar organise très bien cette Coupe du monde. Ne mégottons notre plaisir, nous sommes en finale ». Ça valait bien quelques milliers d’ouvriers morts. À propos de morts, elle arrive quand, la prochaine guerre civile ? Je propose de la fixer à dimanche prochain. D’ici là, les journalistes de CNews se renseignent pour savoir si l’Argentine est un pays musulman.



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