la France se dote d’un nouvel outil pour défendre sa souveraineté

la France se dote d’un nouvel outil pour défendre sa souveraineté

Lithium, cobalt, aluminium, nickel… Parmi la longue liste des métaux qui seront nécessaires à la transition énergétique, il n’en existe pas un seul dont la France maîtrise pleinement la chaîne d’approvisionnement. De fait, malgré les exigences de souveraineté, l’Hexagone et plus largement l’Europe ne produisent quasiment aucun de ces métaux critiques. Et peinent même à gagner du terrain pour ce qui est de leur transformation ou leur raffinage, encore très largement dominés par la Chine. De quoi menacer les approvisionnements, à l’heure où les besoins explosent pour mettre au point les batteries électriques et autres éoliennes, et que les tensions géopolitiques se multiplient.

Pour y remédier, le gouvernement vient de dégainer un nouvel outil : l’observatoire français des ressources minérales pour les filières industrielles (Ofremi). Initié à l’issue du rapport Varin sur la sécurisation des approvisionnements en métaux critiques, celui-ci a été lancé en grandes pompes ce mardi au ministère de l’Ecologie, en présence des ministres de la Transition énergétique et de lIindustrie, Agnès Pannier-Runacher et Roland Lescure. Le but : fournir aux pouvoirs publics et aux entreprises des analyses permanentes sur les chaînes mondiales de fourniture de matières premières, ainsi que sur les besoins actuels et futurs du secteur industriel, afin que chacun puisse sécuriser sa stratégie d’approvisionnement.

« C’est un sujet très sérieux. L’enjeu, c’est de ne pas construire une nouvelle dépendance […], alors qu’on se bat pour sortir de la dépendance aux énergies fossiles », a souligné Agnès Pannier-Runacher.

Relocaliser une partie de la chaîne

Il faut dire qu’il y a urgence, alors que la crise sanitaire et la guerre en Ukraine ont mis au jour la grande fragilité des chaînes d’approvisionnement. Pour autant, l’Ofremi n’a « pas vocation à faire que la France devienne un grand pays minier », explique à La Tribune son directeur, Stéphane Bourg.

« En matière d’approvisionnement minier, on ne comblera jamais notre retard. D’abord, parce qu’on ne dispose pas des ressources nécessaires, et parce que nos industries ne sont pas organisées comme ça », poursuit-il.

De fait, selon le fameux rapport de Philippe Varin publié en début d’année, la dépendance de l’Europe à l’extérieur restera importante sur le sujet, avec « 20 à 30% » des besoins du Vieux continent produits sur le territoire. Dans ces conditions, il s’agira plutôt de mettre à disposition « des informations claires sur les chaînes d’approvisionnement, et ce dès la mine », afin d’éviter toute pénurie de métaux, précise Stéphane Bourg. Ainsi, l’observatoire cherchera à savoir où sont les ressources, les capacités de raffinage, les projets que les grands acteurs miniers ont en tête, et ce qui émergera à l’échéance de 5 ou 10 ans.

L’idée reste néanmoins de relocaliser une partie de la chaîne, afin d’éviter qu’elle ne prenne place à 100% en-dehors des frontières, comme c’est le cas aujourd’hui. « Les données récoltées permettront de potentiellement rouvrir des mines en France ou de pousser pour la valorisation de matières secondaires », indique Stéphane Bourg.

« Dans tous les cas, on devra toujours s’approvisionner à l’extérieur. La question est de savoir à partir de quel niveau de la chaîne de valeur cela fera sens de relocaliser ? », fait-on valoir à l’Ofremi.

A l’exemple, d’Imerys, le leader mondial des minéraux industriels, qui prévoit de produire d’ici à 5 ans 34.000 tonnes d’hydroxyde de lithium par an sur son site de Beauvoir dans l’Allier. Ce volume permettra de fournir ce métal stratégique aux constructeurs de batteries pour équiper 700.000 véhicules électriques par an.

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Consortium de 6 partenaires

Concrètement, l’Ofremi sera animé par le Bureau de recherches géologiques et minières (BRGM), en partenariat avec le Conservatoire national des arts et métiers (CNAM), le Commissariat à l’énergie atomique (CEA), l’institut français du pétrole (IFPEN), l’Agence pour l’environnement et la maîtrise de l’énergie (Ademe) et l’IFRI (institut français des relations internationales), pour la dimension géopolitique.

« Ce n’est pas une structure administrative en tant que telle, mais un consortium regroupant l’expertise de 6 partenaires. Cela apportera une coordination et un consensus sur les données utilisées, ce qui manque aujourd’hui », souligne Stéphane Bourg.

Pour ce faire, l’observatoire sera d’abord financé par des fonds publics, au moins pour ses 30 premiers mois. En effet, le gouvernement français a d’ores et déjà budgété cette année, dans le cadre de son plan d’investissement France 2030, 1 milliard d’euros « pour renforcer la résilience du tissu industriel sur les chaînes d’approvisionnement en métaux ». S’y ajouteront « des fonds privés issus des fédérations industrielles », précise-t-on à l’Ofremi. Autant de moyens qui devraient permettre à cette nouvelle entité d’assurer une veille permanente, de livrer des études poussées sur les technologies, et d’analyser les opportunités filière par filière.

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