« Faire de la France une nation verte et souveraine passera par l’industrie » (Roland Lescure, ministre de l’industrie)
« Faire de la France une nation verte et souveraine passera par l’industrie » (Roland Lescure, ministre de l’industrie)
La Semaine de l’industrie débute ce lundi dans un contexte très différent de celui de l’année dernière. Comment abordez-vous cette séquence alors que la hausse des prix de l’énergie fait craindre un retournement économique voire une récession ?
Je crois d’abord qu’il faut rappeler que le quinquennat précédent et celui qui débute ont fait de la réindustrialisation une vraie priorité, avec des résultats concrets. Depuis près de 15 ans, nous n’avions pas recréé de l’emploi industriel et nous avons réussi à le faire. Concernant la situation actuelle, il y a une réelle inquiétude de la part des industriels et le ministre de l’Industrie la partage. Nous faisons face à une crise énergétique de l’ampleur de celle que nous avons connue dans les années 70 avec les deux chocs pétroliers. Une crise avec des ressorts différents, le gaz et l’électricité, plus que le pétrole, dans un environnement géopolitique contraint.
Le risque de ralentissement est réel. Pour autant, je souhaite que cette semaine nous permette de prendre un peu de recul par rapport à tout cela et de préparer le monde de demain en donnant envie aux jeunes de rejoindre l’industrie pour participer à sa transformation. Je suis convaincu que l’industrie est l’avenir de la France. Si nous voulons faire de la France une nation verte et souveraine, cela passera par l’industrie. C’est toute l’ambition que nous portons depuis cinq ans, avec une fiscalité attractive et des programmes tels que France 2030 lancé il y a un an, qui doivent nous permettre d’accélérer.
Une France verte, car nous devons décarboner nos processus de production. Et c’est l’industrie qui nous donnera les éléments technologiques pour le faire. L’industrie c’est 18% du problème et 100% des solutions, comme a pu le rappeler le Président de la République lors de la réunion avec les dirigeants des 50 sites industriels les plus émetteurs de gaz à effet de serre.
Une France souveraine, car plus nous produirons des choses chez nous, de A à Z, plus nous serons forts pour affronter à la fois les compétitions internationales et les enjeux économiques, sociaux et politiques en France. Je suis convaincu que la montée des colères, des extrêmes et notamment de l’extrême droite est en grande partie liée à la désindustrialisation. Quand l’industrie monte, la colère baisse. La semaine de l’industrie, c’est donc aussi une semaine qui permet de parler de décarbonation, de formation, des métiers de demain et des territoires.
Craignez-vous un crash de l’industrie l’an prochain ?
A ce stade, nous sommes plutôt dans un ralentissement que dans un crash. Nous constatons une industrie à deux vitesses. Il y a d’un côté une partie de l’industrie qui va bien. C’est celle qui n’est pas trop énergo-intensive et qui peut augmenter ses prix. L’aéronautique par exemple a rebondi fortement après la Covid et va bien. Et même s’il y a des sous-traitants qui souffrent, le secteur a globalement des carnets de commandes pleins et peut augmenter ses prix. L’électronique se porte très bien également. J’ai récemment inauguré l’usine Lacroix dans le Maine-et-Loire, une usine 4.0, qui fait des circuits électroniques. Face à une forte demande, l’entreprise augmente la taille de son usine et rencontre des difficultés à recruter pour suivre la hausse de son carnet de commande. Nous avons investi massivement dans ce secteur, avec un objectif de doublement de la production française d’ici à 2030.
De l’autre côté, il y a l’industrie qui souffre : les verriers, les aluminiers, les aciéries, qui sont intensifs en énergie et ne peuvent pas augmenter leur prix. La facture énergétique d’ARC par exemple s’élevait à 20 millions d’euros en 2021. En 2022, elle sera à 63 millions d’euros et pourrait grimper jusqu’à 200 millions d’euros en 2023. Des hausses qui sont impossibles à répercuter sur les prix. Vous ne pouvez pas tripler les prix des verres.
Nous accompagnons les entreprises face au choc actuel, notamment en amplifiant, simplifiant, et prolongeant les dispositifs d’aide. Nous avons récemment fait des annonces sur les dispositifs applicables aux entreprises et nous avons ouvert le guichet d’aides samedi. Ce sont des moyens massifs pour aider ces entreprises. Au-delà, j’ai demandé aux services de l’Etat, partout sur le territoire, d’accompagner au cas par cas les entreprises qui font l’objet de chocs particuliers. Un peu plus de 400 entreprises nous ont alertés sur les difficultés qu’elles rencontraient et nous les accompagnons. Certaines vont vraiment bénéficier d’aides importantes. Pour l’imprimeur Maury par exemple, elles pourraient aller jusqu’à 10 millions d’euros.
Quelle somme avez-vous prévu pour éviter le pire ?
Nous l’avons budgété. Nous avons adopté au niveau européen et retranscrit dans le PLF une « contribution aux rentes infra-marginales », une taxe sur les superprofits qui ne dit pas son nom. Les entreprises de l’énergie, qui ont gagné beaucoup d’argent en profitant de la hausse des prix des matières premières, vont être taxées au niveau européen. Pour la France cela représentera 7 milliards d’euros supplémentaires pour aider les autres entreprises en 2023. Nous avons déjà budgété 3 milliards d’aides aux entreprises et 2 milliards pour les collectivités locales. Au total cela fait 12 milliards d’euros, dont 10 pour les entreprises. Cela fait beaucoup d’argent, mais nous en avons besoin pour soutenir nos entreprises et nos emplois. A plus long terme, il y a l’enjeu de la compétitivité.
Justement, les Etats-Unis ont mis en place cet été l’Inflation Reduction Act (IRA), un plan de lutte contre le changement climatique prévoyant 370 milliards de dollars pour la construction d’éoliennes, de panneaux solaires et de véhicules électriques. Ce plan favorise clairement l’industrie américaine puisque dans l’automobile par exemple, les crédits d’impôt dollars seront réservés aux achats d’un véhicule électrique sortant d’une usine nord-américaine avec une batterie fabriquée localement, excluant de facto les automobiles produites dans l’Union européenne. Ce plan menace-t-il la réindustrialisation de la France ?
L’Inflation Reduction Act (IRA), le grand plan dit de réduction de l’inflation de Joe Biden, est un grand plan de subvention massif de la décarbonation de l’économie américaine. Les Américains se réveillent et considèrent qu’il est temps de décarboner leur industrie, mais ils le font sans respecter les règles de la compétition internationale. Le plan France 2030, que nous devons accélérer pour atteindre 20 milliards d’euros fin 2023, contribue à une partie des réponses au niveau national mais nous devons construire une réponse européenne forte. Avec la taxe carbone aux frontières, les règlements européens qui vont vers plus de contenus européens, plus de contenus recyclés dans les batteries, nous sommes en train nous aussi de nous organiser pour qu’une bonne part de la production de l’industrie de la décarbonation soit faite en Europe. Les montants annoncés par les Etats-Unis, rapportés au PIB, sont comparables aux montants mobilisés par le gouvernement français dans le cadre de France 2030. Mais c’est vrai que les Américains vont plus loin, ils mettent des barrières protectionnistes. L’Europe doit y répondre et le Président de la République a évoqué une réflexion politique et industrielle à lancer sur un Buy European Act au niveau européen. Thierry Breton porte aussi ce message au sein de la Commission européenne.
Une plainte à l’Organisation Mondiale du Commerce est-elle envisageable sachant que le processus peut durer des années comme l’a montré le dossier sur des aides à l’aéronautique qui a opposé Bruxelles à Washington pendant une quinzaine d’années ?
Les options sont nombreuses. Passer par l’OMC peut être long en effet. Nous regardons également d’autres pistes. Bruno Le Maire participera à la visite d’Etat du Président de la République à Washington, début décembre. Le sujet de l’IRA y sera abordé. Et j’aborderai également ce sujet avec mes homologues européens lors du prochain conseil compétitivité à Bruxelles.
Les Etats-Unis ne font-ils pas ce que demandent en France les constructeurs automobiles pour se protéger de la concurrence chinoise ?
Oui et non. Oui, il ne faut pas être naïf. Il faut que la concurrence soit saine, juste et équitable. Le problème, c’est qu’une porte, quand vous la fermez, elle se ferme dans les deux sens. Je veux de la souveraineté, pas du protectionnisme. Si on veut exporter nos avions, nos vélos, nos voitures, nos produits de luxe, nos produits pharmaceutiques, des montres, du textile qu’on va reproduire en France, nous avons besoin que les autres grands marchés restent ouverts à nos produits. La réindustrialisation passe aussi par l’export; le marché français ne suffira pas à nos industries. Il faut donc répondre par des mesures similaires sans s’enfermer. De ce point de vue-là, nous avons un levier important, car l’Europe est l’un des plus grands marchés au monde. Naïfs, nous l’avons été trop longtemps. Il faut être ferme mais rester ouvert. Le risque aujourd’hui, c’est le repli : nous sortons d’une pandémie mondiale et ces événements se sont toujours terminés par du repli sur soi. La guerre aux portes de l’Europe, c’est aussi un facteur de repli sur soi. Le populisme au pouvoir dans de nombreux pays aura aussi tendance à favoriser le repli sur soi. Il ne faut pas tomber là-dedans car personne n’y gagne.
L’Allemagne a annoncé un plan de soutien de 200 milliards d’euros. Devant une telle aide qui peut entraîner de fortes distorsions de concurrence au sein de l’UE, y a-t-il encore une Europe qui fonctionne ?
Il n’y a pas d’alternative à une Europe qui fonctionne. Face à la concurrence internationale, à un choc mondial, aux défis de la décarbonation qui doit se traiter au niveau européen, il n’y a pas d’autre choix. Comme toujours, quand on fait face à des changements structurels, cela prend un peu de temps. Il y a des discussions difficiles. Mais attention, le plan allemand doit encore se décliner concrètement et il n’y a pas encore un euro qui soit tombé dans la poche des entreprises allemandes pour l’instant. En France, nous avons déjà aidé les entreprises françaises. Nous avons vendu 20 térawattheures d’électricité supplémentaires à prix réduits en 2022, ce qui a permis de diminuer la facture des entreprises industrielles françaises. Nous avons mis en place un guichet d’aide. Nous avons fait un bouclier énergétique pour les ménages français. L’Allemagne discute avec la Commission, pour que les aides qu’ils souhaitent faire soient conformes aux règles communautaires. Et là-dessus je vais être très clair, et la Première ministre l’a dit : si l’Allemagne dans ses discussions avec la Commission obtient des exemptions au régime d’aides d’Etat pour son plan, nous ferons de même. Il est hors de question que nous ayons un déséquilibre concurrentiel au sein de l’Union Européenne entre deux grandes nations industrielles que sont l’Allemagne et la France.
Vous demandez de la réciprocité
Et de la justice dans la concurrence. On sera ferme et pragmatique. Depuis cinq ans, nous commençons à inverser la tendance, à réindustrialiser après 25 ans de déclin. La France a recréé 57.000 emplois industriels. Nous sommes le pays le plus attractif d’Europe. Pour la 3ème année consécutive, nous sommes le pays d’Europe où il y a les plus de projets d’investissements, d’installations d’usines qui viennent de l’étranger. Nous ne voulons pas arrêter cette dynamique pour des raisons de concurrence déloyale. Évidemment, on va continuer ce mouvement. C’est compliqué, coûteux, risqué, mais nous allons continuer.
Avez-vous des exemples de projets industriels prévus en France qui ont été annulés pour aller vers d’autres pays ou retardés ?
Pour l’instant, nous n’avons vu aucun transfert. Mais nous avons des alertes. Safran qui voulait consolider son usine de freins à carbone à Villeurbanne a mis son projet en attente.
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Sans aide de l’Etat, la France risque de perdre une partie de son outil industriel pour le jour où la situation sera meilleure…
Exactement. L’essentiel c’est de créer l’industrie du futur et d’épouser la révolution industrielle du 21ème siècle qui est la décarbonation. Les deux vont de pair. Si vous voulez décarboner les transports automobiles, il faut créer des voitures électriques, des batteries, aller chercher du lithium, être capable de recycler les batteries, d’avoir à terme de l’hydrogène vert pour motoriser les camions, les trains et les bus. C’est ça la vraie révolution et ce sont précisément les secteurs que nous avons commencé à aider à travers France 2030. Cela peut être un avantage comparatif de l’Europe et surtout de la France.
Il faut aller vers l’industrie zéro carbone. Pour cela, nous avons un premier plan très simple. Il y a 50 sites en France qui représentent 58% des émissions de gaz à effet de serre (GES) de l’industrie. A eux seuls, ils représentent 10% des émissions des GES françaises. C’est énorme. Le Président les a réunis à l’Elysée avec l’idée de lancer un plan de décarbonation de ces 50 sites. Nous allons les accompagner en mettant sur la table 5 milliards d’euros, puis 10 milliards s’ils sont capables d’aller encore plus loin dans la décarbonation. Si nous décarbonons ces 50 sites, c’est gagné, nous aurons fait une bonne partie du chemin. Après il faudra aider les PME … Pour cela, il faut de l’électricité bas carbone en quantité et à un prix modéré. Cela passera par les énergies renouvelables, par le fait d’investir dans le nucléaire, avec les nouveaux EPR, de développer éventuellement à terme les SMR (Small Modular Reactors), d’accélérer le développement des éoliennes en mer et du solaire. Il y a donc un plan pour ces 50 sites. Le Président nous a donné 6 mois pour lui apporter un plan détaillé.
Il faudra également accompagner les PME. Comment fait-on ?
Churchill disait qu’il ne faut jamais gâcher une bonne crise. Il faut profiter de la crise pour accélérer la transition. Nous avons d’ailleurs prévu des moyens à cette fin et le Président a demandé à ce qu’un plan soit mis en place pour sensibiliser et soutenir la décarbonation des 26.000 PME industrielles.
C’est compliqué, car les gens ont un peu le nez sur le guidon. Mais j’ai vu des entreprises, comme Duralex, qui ont revu leur technique de fonte du verre et ainsi économiser 30% de leur dépense énergétique. Chez Setforge, en Moselle, ils sont tous passés en travail de nuit, car l’énergie est moins chère la nuit. C’est exceptionnel et cela montre l’engagement des salariés.
Cela fait un peu économie de guerre…
Un peu. Mais vous parliez de palettes qui brûlent. Moi je n’en vois pas. Quand je vais dans les usines, je rencontre les organisations syndicales. Les syndicats sont inquiets, mais mobilisés pour sauver leur outil de travail. Dans l’industrie, il y a, en général, un alignement fort entre les actionnaires, les dirigeants et les organisations syndicales à propos de l’attachement à l’outil de travail. Les gens sont prêts à faire des sacrifices. Il y a une adaptabilité à court terme. A Setforge, en contrepartie du travail de nuit, ils ont eu des augmentations de salaires, ce qui n’est pas négligeable en période d’inflation. Ils espèrent que cela sera temporaire. A court terme, certaines usines ferment des fours, baissent l’activité, travaillent de nuit pour parer à l’urgence, mais il faut aussi penser investissement à moyen terme.
De combien pourrait baisser la production industrielle l’an prochain ?
Il y a une grande incertitude. La France reste sur une prévision à 1 % de croissance en 2023, le FMI est à 0,7%, l’Allemagne sera en récession. Sur la production industrielle, même si j’ai vu des chiffres qui circulaient, je n’ai pas assez de recul. Mais n’oubliez pas qu’il y a aussi des secteurs qui vont bien, parce qu’ils sont en rattrapage.
Concernant l’industrie automobile, les industriels déplorent que l’Europe aille trop vite pour la décarbonation.
Je pense qu’ils ont digéré cela et sont passés à autre chose. Quand certains à la Commission européenne ont ouvert la possibilité d’une clause de revoyure, la réponse a été : « maintenant on y va ». Nous faisons par ailleurs des efforts massifs pour accompagner cette transition, à la fois sur la production de véhicules électriques (nous avons sécurisé un million de véhicules), sur les batteries (3 gigafactory) ou encore sur l’électronique, les logiciels et les matériaux critiques.
Pourtant, on sait qu’on n’aura pas assez de matières premières pour construire autant de batteries électriques que nécessaire pour changer tout le parc actuel…
Nous allons extraire du lithium en France, dans l’Allier, on va nommer un délégué interministériel aux métaux rares qui va nous aider à sécuriser les approvisionnements des différents matériaux de base. Nous organiserons plus tard plus de recyclage, lorsque nous aurons des batteries qui auront servi une fois. Nous nous organisons. Avec France 2030, nous avons déjà mis en place de très nombreux dispositifs de soutien à tous ces projets. Il faut se donner des objectifs clairs et ambitieux et s’organiser en conséquence si nous voulons y arriver. Les industriels que nous avons vus il y a quelques jours sont mobilisés et motivés. J’ai réuni un comité stratégique de filière automobile récemment, et tout le monde était dans l’état d’esprit « on arrête de râler et on y va ».
Concernant l’hydrogène, quel regard portez-vous sur la divergence qui oppose ceux qui voudraient produire en Europe et en France notamment et ceux qui prônent un commerce international ?
Pendant 100 ans nous avons développé l’industrie à partir d’une dépendance aux hydrocarbures, qui n’étaient pas produite chez nous. On l’a payé cher dans les années 70 avec les chocs pétroliers et nous le payons cher cette année, avec le gaz russe. Si l’hydrogène sert à remplacer une dépendance par une autre, je ne vois pas l’intérêt. Nous avons les moyens de notre souveraineté énergétique, à condition d’assumer le choix nucléaire.
Il faut une souveraineté énergétique. Il faut assurer notre approvisionnement de manière durable. Si nous électrifions la France, il faut être sûr que l’électricité va arriver. Si c’est pour faire venir de l’hydrogène qui ne sera pas très vert, d’ailleurs, on déplace le problème. Si on veut être la première nation et le premier continent « carbone neutre, » il faut s’en donner les moyens. Cela apparaît comme des contraintes, mais il ne faut pas oublier que ce sera un avantage compétitif majeur. Dans 30 ans, on sera le premier continent carbone neutre. Ce sera un avantage compétitif avec une énergie moins chère pour attirer les talents, du capital et vendre des produits.
C’est aussi pour cela que nous soutenons massivement la production d’hydrogène en France, le développement de gigafactory d’électrolyseurs. Trois sont déjà lancés et nous les soutenons massivement via France 2030.
Vous avez évoqué le projet de mine de lithium dans l’Allier. Craignez-vous une d’opposition à ce retour des mines en France ?
J’ai passé 10 ans au Canada, c’est un vrai sujet. On a clairement deux modèles qui vont s’opposer. Il faut avoir ce débat à l’Assemblée et dans le public. Quel type de modèle économique veut-on ? Sans caricaturer, il y a un modèle de décroissance quasi assumée. Et un modèle de croissance raisonnable. On fait plus, mais mieux. Il y aura un débat, mais je crois à la « mine responsable ». Cela existe. J’en ai vu au Canada. La manière dont on traite à la fois l’environnement socio-économique, l’environnement, comment on dépollue quand on ferme la mine. Mais cela veut dire que les matières premières sont plus chères. On peut le faire en France. On sait le faire.
Pour redonner l’envie de l’industrie, il faut relever le défi de formation et lutter contre une image hélas encore négative de l’industrie en France
Bien sûr. La semaine de l’Industrie doit donner envie d’industrie. Les jeunes disent que l’industrie ne paye pas, pollue et est pénible. En fait, cela paye, en moyenne 250 euros de plus par mois que dans les services. Cela dépollue, ce sera le vecteur majeur de la dépollution, et c’est moins pénible que cela l’a été. Il y a des industries qui n’utilisent la main d’œuvre que pour des tâches de précision, de contrôle, plus que pour des tâches lourdes et difficiles. C’est en train d’évoluer. Et je vois de beaux projets se concrétiser, avec l’académie de la batterie ou des programmes dans le nucléaire. La formation est d’ailleurs aussi au cœur de nos priorités avec du soutien aux nouvelles formations dans France 2030 que nous devons mieux structurer, et de très nombreuses autres actions.
Qu’y-a-t-il au programme de cette semaine de l’industrie ?
Beaucoup d’innovations seront présentées : on va aller sur le terrain, faire des journées thématiques autour des talents et de la formation. Pour donner envie d’industrie aux garçons, mais aussi aux jeunes filles. Mercredi matin, on sera dans une école de production. Jeudi prochain, 1000 jeunes viendront à Bercy au Centre de conférence Pierre Mendès France, avec le ministre de l’Education nationale, Pap Ndiaye pour leur parler d’industrie. On finira par un concours d’éloquence avec les équipes des grandes écoles, qui vont participer à une compétition dont la finale sera le procès de l’industrie. Pour ou contre l’industrie. Ce sera diffusé sur les réseaux sociaux. On essaye de faire quelque chose d’un peu fun. Chez Aluminium Dunkerque, la patronne de la production, c’est une femme, une ancienne de chez Alcan. On va faire un TedX où des femmes emblématiques de l’industrie vont parler de leur métier. Après, les semaines c’est bien beau, mais il faut parler de l’industrie tous les jours. C’est face à des vents contraires, qu’il faut tenir la barre, qu’il faut rester dans une logique de réindustrialisation, malgré les vents de face.
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