Pit Baccardi : « J’ai participé au développement de la scène kamer » – Jeune Afrique

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IAM, Medine, Arsenik, Kery James, Rohff… Autant de pointures du rap français qui ont gravité autour de celui qui s’est d’abord fait une réputation dans l’Hexagone dans les années 1990-2000. Fini les disques et les mixtapes pour le « ghetto ambianceur ». À 44 ans, Pit Baccardi – Guillaume N’Goumou de son vrai nom –, est depuis 2020 directeur label de la filiale africaine d’Universal Music implantée à Abidjan.

Coorganisateur du Salon des industries musicales d’Afrique francophone (SIMA), qui se tiendra les 17 et 18 novembre prochain à l’hôtel-Ivoire d’Abidjan, Pit Baccardi espère répondre aux problématiques prioritaires du marché musical en Afrique, à commencer par la digitalisation. Il a réuni pour ce faire un beau panel d’acteurs de l’industrie (producteurs, éditeurs, artistes, juristes…), allant d’Olivier Laouchez, PDG de Trace, à Elvis Adidiema, directeur général de Sony Music Afrique francophone, en passant par Benjamin Ifrah, responsable de la distribution des musiques urbaines chez Believe.

Un écosystème en construction

« Quand je suis arrivé sur le territoire il y a plus de dix ans, il n’était pas question de discuter avec des plateformes ou de mettre en place des conférences, parce qu’on n’avait pas la consistance nécessaire pour le faire, ni de monter des tournées africaines, faute de structures adéquates, rembobine-t-il. Aujourd’hui, on a clairement un écosystème, encore en construction certes, mais on a des références en matière d’artistes, de producteurs et de structures. Personne n’aurait pensé que des majors comme Universal ou Sony se seraient installées sur le continent, et c’est pourtant le cas aujourd’hui. Le Sima arrive à point nommé », se félicite le quadragénaire.

On n’a pas la prétention d’amener la paix en musique, mais diffuser des messages d’union reste essentiel

C’est que Pit Baccardi n’en est pas à son premier coup d’essai. L’industrie musicale africaine, il la connaît de l’intérieur. En 2010 déjà, l’ex-gamin de Yaoundé fait son retour au pays et lance le label Empire. Il intègre l’environnement kamer et participe au développement de la scène en tant que producteur.

« Cela va sûrement paraître prétentieux si je dis que j’avais une base de fans sur le continent, mais c’est bien ma notoriété qui m’a permis d’ouvrir certaines portes sur le plan local. Cela a été un facilitateur pour signer des artistes, car j’avais déjà une crédibilité en tant que rappeur, même s’il a fallu que je fasse mes preuves en tant que producteur », concède-t-il. Pit révèle bientôt le groupe de musique urbaine X-Maleya. Il voit en ce trio un potentiel commercial, mais surtout l’un des rares groupes capables de « réunir toutes les populations et ethnies du Cameroun ». Nous sommes en 2013, et après deux albums au compteur, le combo fait son Olympia, à Paris.

Soutenir les artistes

Un petit succès qui fait décoller la scène kamer, avec l’émergence d’artistes urbains comme Locko, Stanley Enow, Jovi, ou encore Daphné. « Il y a quelque chose qui relevait de la peur d’oser qui s’est libéré à ce moment-là. On a prouvé que les artistes locaux pouvaient avoir le même rayonnement qu’un groupe européen. On a créé ensemble une dynamique, et ce mouvent fait qu’aujourd’hui on peut avoir des structures comme Trace, qui ouvre une filiale au Cameroun, après s’être implanté en RDC. Je peux me vanter d’avoir contribué, à ma petite échelle, à la création d’une scène ».

Une démarche rassembleuse, chère au Camerounais, touché par la crise sécuritaire que traverse. « J’y ai perdu des proches et des amis. On n’a pas la prétention d’amener la paix en musique, mais diffuser des messages d’union reste essentiel », assure le chanteur, qui a donc posé sa voix sur le morceau We need peace, sorti en 2018 au moment du conflit, entouré d’artistes francophones comme anglophones, à l’instar de Nabila, Ko-C, Blanche Bailly, Daphne, Minks’, Mr Leo, Blaise B et Sango Edi.

Aujourd’hui basé à Abidjan, comme son homologue Youssoupha, il n’en oublie pas son Cameroun natal, qui a également vu le retour de Yannick Noah récemment. « Ce phénomène de retour au pays chez les artistes a toujours existé, mais pas la promotion de la démarche. Parce qu’on ne voyait pas le continent comme un terrain propice à faire du business, à cause de l’informel et des modes de fonctionnement différents, constate-il. Les gens originaires d’Afrique ont tous un pincement au cœur quand ils reviennent, surtout quand ils ont cartonné en France, et qu’ils constatent, comme moi, l’amour des populations. C’est pour cette raison que l’on a tous cette volonté de faire quelque chose. »

Pour l’heure, c’est en pérennisant le Sima et en structurant le statut d’artiste en local que Pit Baccardi entend soutenir ses héritiers, Dosseh, « un petit frère », Suspect95, DidiB, Jobi, ou encore Samba Peuzzi.


SIMA, les 17 et 18 novembre 2022 à l’hôtel Ivoire, Abidjan

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